#93 - Nicolas Hennion [Libérez La Bête] | Violence ordinaire : éducative ou au travail, c’est quoi et comment en sortir ?

Si vous aimez les émotions, cet épisode sur la violence ordinaire vous ravira. Comment passe-t-on des violences ordinaires, éducatives et professionnelles, à une authentique séquence émotion ? En échangeant sur les outils existants pour lutter contre elles ! Avec Nicolas Hennion, de l’entreprise « Libérez la bête », nous avons commencé par définir ce qu’est la violence ordinaire. Ensuite, Nicolas a partagé avec moi ce qu’il a mis en place dans les différentes sphères de sa vie pour les diminuer. Comme beaucoup de choses, cette lutte commence… par soi-même. Cet épisode d’Aventure Humaine inclut donc aussi une belle dose de partage d’expérience sur le développement personnel. Attention : cette discussion pourrait générer des réactions désagréables… Nous vous proposons d’essayer de les accueillir, le temps de cet échange. Laissez-vous juste guider par la vision des choses qui est proposée ici. Comme son nom l’indique : la violence ordinaire est banalisée. Elle est donc difficile à percevoir sans un minimum de lâcher-prise et de prise de recul

La violence ordinaire, qu’est-ce que c’est ?

Avant de voir comment il est possible de sortir de la violence ordinaire, mettons-nous d’accord sur ce que c’est ! Cette notion commence à être un peu plus connue, notamment ce qu’on appelle les VEO : violences éducatives ordinaires, qui concernent spécifiquement les enfants. Malgré tout, la violence ordinaire peut tout aussi facilement se rencontrer dans le couple, dans le monde du travail, ou encore à l’encontre de nous-même… Quoi qu’il en soit, c’est un sujet qui reste aujourd’hui encore bien trop peu abordé.

Dans pas mal de pans de notre vie, on est confronté à des situations de violences ordinaires, c'est-à-dire une violence qui passe sous les radars, qui est très acceptée, qui est même tellement répandue que la plupart des gens s'en accommodent très bien et ne s'en rendent même pas compte.

Voilà ce dont nous parlons ici : de façons de faire, de schémas, qui sont perçus comme normaux et qui pourtant, ne nous respectent pas.

Vous avez besoin d’exemples concrets pour comprendre ce dont il peut s’agir ? Nicolas nous en a fourni. Nous avons commencé par un exemple de violence éducative ordinaire, bien sûr.

À l'école, est-ce que c'est respectueux ou pas, d'un enfant de 6 ans, 8 ans, 10 ans, qu'il soit assis 6 h par jour, 7 h par jour ? Souvent avec la nécessité de demander, s'il a juste besoin d'aller faire pipi, et que ce ne soit pas mécaniquement autorisé... Est-ce que c'est respectueux de la physiologie d'un enfant, de fonctionner comme ça ? Nous, on considère qu'il y a une certaine violence là-dedans, quand on voit que, par ailleurs, nos enfants, en fait, ils ont un besoin de bouger. Spontanément, mécaniquement, ils ne restent pas plus de 20 minutes sans remuer, dans leur environnement naturel, quand ils jouent, etc. Donc là aussi, situation, finalement, de violence, de contrainte, qui est totalement banalisée, mais qui est réelle quand même.

Dans le monde professionnel, on peut illustrer la violence ordinaire au travers, par exemple, de la façon dont certains objectifs sont fixés. Est-ce respectueux d’objectiver un commercial sur ses ventes, alors que la génération de prospects n’est pas entre ses mains ? Cela engendre un stress, une pression, qui sont une forme de violence à son égard.

Comment lutter contre les VEO et la violence ordinaire ?

Dans le monde du travail

Une fois qu’on a compris ça, on se demande naturellement ce que nous pouvons mettre en place contre cette violence ordinaire. Nicolas partage avec nous de nombreuses pistes dans cet épisode de podcast.

Certaines concernent la violence ordinaire que nous pouvons trouver dans les entreprises. Ensemble, nous avons parlé, entre autres, de l’entreprise libérée, telle qu’elle est utilisée par « Libérez la bête », l’entreprise de Nicolas.

L'entreprise libérée, pour moi, c'est un moyen plus qu'une fin. [...] C'est un très bon moyen pour injecter un gros niveau de ce que j'appelle […] le mode 100 % responsable, c'est-à-dire : assumer délibérément, dans une entreprise donnée, que le déni, les justifications et les accusations, on va les laisser de côté. [...] On n'est plus du tout dans la recherche de culpabilité. [...] La peur de ne pas être à la hauteur, du coup, diminue drastiquement, parce que c'est assumé, que cette petite voix peut arriver. C'est tout à fait assumé que, du coup, on peut la partager avec les autres : « Là, je suis un peu emmerdé parce que j'ai ma petite voix qui me dit ça et je sais qu'elle me pipeaute. Qu'est-ce qu'on peut faire ? Est-ce que vous pouvez m'aider ? ».

Grande source de violence ordinaire, Nicolas nous parle longuement de la notion de hiérarchie. Au lieu de penser une entreprise de façon verticale, il nous propose de plutôt l’envisager à la façon d’un organisme vivant. Cet organisme a besoin de divers organes vitaux pour vivre. Repenser l’organisation et les interactions entre chacun de ces « organes vitaux » peut amener de grands, grands changements.

Au sein de la famille

Concernant la violence ordinaire dirigée contre les enfants ou son conjoint, Nicolas nous donne aussi des exemples d’actions concrètes à mettre en place. Il nous livre, au passage, de touchants témoignages personnels que je vous engage à découvrir !

Un rituel de « cercle de parole » a été instauré chez lui, grâce à :

  • un cahier et un stylo auxquels tout le monde a accès ;
  • un temps dédié pour lire ce cahier et discuter des points notés.

Cela n’a l’air de rien, dis comme ça, mais le témoignage de Nicolas nous montre bien combien ça peut être impactant… y compris avec les enfants les plus jeunes.

Au sein de sa famille, Nicolas et sa femme ont aussi instauré 2 rituels :

  • un verbal : le mot « stop » comme mot sacré ;
  • un non-verbal : le fait de montrer son niveau de tension sur son bras.

Cette seconde habitude permet, par exemple, de faire comprendre aux enfants qu’on est prêt à exploser simplement en montrant son épaule, sans avoir à hausser la voix.

Là, j'ai besoin d'un certain niveau de silence dans la maison, pour enregistrer cet épisode. […] J'ai expliqué : « j'enregistre un épisode, du coup, j'ai besoin, vraiment, de beaucoup de calme pendant une heure et demie pour qu'on n'entende pas des cris, des éclats de voix pendant que j'enregistrerai... ». Je sais que si jamais ce n'est pas respecté, je vais avoir besoin d'une seconde pour sortir et dire : « stop », sans forcément hausser la voix et ça va être perçu comme : « ah, mais vraiment, il n'est pas en train de rigoler, c'est... il y a urgence absolue, c'est stop ».

Quelle place pour le développement personnel contre la violence ?

Pourquoi lutter contre les violences ordinaires dirigées vers soi-même ?

Un élément majeur de mon échange avec Nicolas, c’est… la violence ordinaire qu’on s’inflige à soi-même. Hé oui… Celle-ci peut prendre de multiples formes :

  • toutes nos croyances limitantes,
  • tous les schémas que nous reproduisons sans en avoir conscience,
  • cette petite voix intérieure qui nous culpabilise si facilement,
  • nos peurs qui nous brident malgré nous ;
  • ces moments où on « se fait violence » justement, pour réaliser une action donnée, etc.

Ainsi, travailler sur soi-même avec du développement personnel (au sens où l’entend Nicolas, car il sait comme nous ce que ce terme peut regrouper de bullshit…), cela nous permet :

  • d’être plus respectueux et doux envers nous-même ;
  • mais aussi, et c’est si important, de limiter les schémas et croyances que nous transmettrons aux générations futures.

Mais comment faire ? Après 10 ans à travailler sur lui-même, Nicolas a beaucoup à dire sur le sujet… Son témoignage est particulièrement riche en émotions. Dans sa besace, il a plein d’outils accessibles, et d’autres qui le sont un peu moins. Dans tous les cas, il conseille de :

  • observer ses émotions, leur faire une place et les considérer pour ce qu’elles sont ;
  • se donner la permission d’apprendre à réagir autrement face à elles ;
  • prendre conscience qu’il est capital d’être connecté à son corps ;
  • (ré)apprendre à l’écouter et à fonctionner main dans la main avec lui ;
  • si besoin, utiliser des techniques de libération émotionnelle, ou libération traumatique (hypnose, sophrologie, méditation, yoga…).

Quelles techniques de développement personnel utiliser ?

Quel que soit l’objectif de développement personnel que vous pouvez poursuivre, Nicolas vous conseille d’en tester plusieurs… et de les appréhender sans à priori.

Il y a : - des techniques par la tête ; - des techniques par le corps ; - des techniques dans lesquelles on a besoin d'avoir mis des mots conscients sur le trauma qu'on veut libérer ; - des techniques où juste en observant les conséquences que ça a dans notre vie, ça permet d'imaginer le trauma et d'aller le résoudre sans qu'on ait besoin forcément d'aller creuser tout au fond et d'être sûr et certain que ça a existé...

La question de la connexion au corps peut être particulièrement complexe dans notre société qui l’aborde d’un point de vue très médical… Aussi, nous avons passé un grand moment sur ce sujet précis. Si les médecines douces sont aujourd’hui de plus en plus connues, reconnues et sollicitées, ce n’est pas le cas de tous les outils existants.

Connaissez-vous, par exemple, la méthode NERTI, ou encore la respiration holotropique ?

La respiration holotropique, ça consiste en quoi ? […] On a tous constaté que quand on respire [fort] une vingtaine de fois d'affilée, on a la tête qui tourne. Eh bien quand on le fait 200 fois d'affilée, dans un certain contexte, quand c'est un peu entouré, non seulement on a la tête qui tourne, mais on chavire. « On chavire », ça, ce sont les termes chamaniques, c'est-à-dire qu'on bascule dans des états modifiés de conscience... Sans produit hein ! On n'a pas besoin de prendre du LSD ou de l'ayahuasca ou quoi que ce soit. Juste, on bascule automatiquement et mécaniquement dans un état de transe, qui est un état de transe très respectueux.

Nicolas nous fait également découvrir un domaine très obscur pour beaucoup de gens : le tantrisme, notamment au travers de la sexualité.

C'est une approche qui permet de réconcilier, si je la résume, les hommes et les femmes. Les hommes dans leur puissance, sans qu'elle se décline en violence, en prise de pouvoir ou en abus, mais sans renier cette puissance, qui est phénoménale. Les femmes dans leur puissance aussi, mais qui est très différente, qui est très accueillante, qui est colossale également.

Mais aucun résumé ne saurait expliqué correctement ce que Nicolas nous transmet au travers de ce que le tantrisme évoque pour lui. Je ne peux que vous inviter à aller l’écouter. Émotions garanties !

 

Si vous avez envie de lutter contre la violence ordinaire, mais aussi de découvrir de nouvelles façons de vivre en famille, de travailler ou de se développer personnellement : cet épisode de podcast sera une mine d’or pour vous.

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Avec Nicolas, nous avons parlé de :